Par Marie-Andrée Chouinard - Le Devoir Le lundi 25 février 2002 Cette Canadienne, immigrée de la Chine il y a 13 ans, était
loin de se douter que son existence allait être bouleversée
de la sorte en unissant en 1999 sa destinée à celle de ShenLi
Lin, un comptable chinois adepte comme elle du Falun Gong. «ShenLi ne m'a pas encore raconté en détail les conditions de sa détention, parce qu'il croyait la ligne téléphonique surveillée, expliquait hier son épouse, qui a multiplié les démarches depuis décembre 1999 pour tenter de faire libérer son conjoint. Il a parlé de torture mentale insupportable, mais il dit que tout ce dont il se souvenait du Falun Gong et sa pratique quotidienne lui ont permis de se couper des horreurs qu'il vivait. Il a gardé toutes les bonnes choses en lui.» Fervents adeptes de cette philosophie chinoise issue de Bouddha qui «vise à raffiner le corps et l'esprit par des exercices spéciaux et de la méditation», ShenLi Lin et Jinyu Li ont défilé dans un bureau gouvernemental pékinois neuf mois après leur mariage pour demander que cesse la persécution envers les adeptes du Falun Gong. Ils furent arrêtés sur-le-champ. «Mme Li a été chanceuse, explique Yumin Yang, porte-parole du mouvement à Montréal. À cause de sa citoyenneté canadienne, elle a été libérée en 48 heures et ramenée au pays.» Son mari n'eut pas cette chance. Détenu d'abord un mois, il fut
ensuite transféré dans un «camp de travail»
à Dafeng, dans la province chinoise du Jiangsu. «J'ai envoyé
des dizaines de lettres, on a essayé par tous les moyens de l'atteindre,
je suis allée à Genève demander l'aide de la Croix-Rouge
afin de communiquer avec lui, mais rien n'a fonctionné»,
explique Jinyu Li, qui affirme avoir eu au bout du fil ces derniers jours
un homme qui ressemble tout à fait à celui qu'elle a vu
pour la dernière fois en décembre 1999. En juillet dernier, Jinyu Li avait retrouvé le sourire, apprenant
que son mari allait être libéré sous peu. Toutefois,
les autorités chinoises ont prolongé de six mois la détention
de son mari, sans apporter d'explication, précise-t-elle. «Pour
lui aussi ç'a été la même chose, raconte la
jeune femme. Il devait être libéré et on a poursuivi
sa détention sans lui donner de raison.» D'autres détenus liés au Canada d'une certaine manière ont connu des libérations heureuses, peut-être en raison des pressions exercées par certains organismes humanitaires, les médias et la population, croit Yumin Yang. «Sans l'aide de tous ces gens au Canada, jamais ce n'aurait été possible, explique Jinyu Li. Mon mari et moi voulons le dire, merci, merci.» |