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HUMAN RIGHTS WATCH Rapport mondial 2002 – Chine (Extraits)

5 février 2003

HUMAN RIGHTS WATCH Rapport mondial 2002 – Chine (Extraits)   

(1ère partie)

Les préparations pour le 16ème congrès du Parti Communiste Chinois et le changement à la tête  qui les a accompagnés ont marqué les pratiques des droits de l’homme en Chine en 2002. Soucieux de maintenir la stabilité économique et sociale alors que la transition se dévoile, les dirigeants à Pékin semblent calculer soigneusement quand marcher sur des œufs et quand prendre des mesures sévères.

Les dirigeants ont nettement avancé, cependant, pour limiter la libre expression et bâtir un mur autour d’Internet, pour détruire le Falun Gong, au delà même des frontières chinoises et pour éliminer les dissidents (…)

Alors que les médias chinois continuent de proliférer et contestent de plus en plus les directives du gouvernement, les autorités de propagande répondent en obstruant la libre circulation de l’information. Elles bloquent les principaux moteurs de recherche d’Internet, ferment les publications, harcèlent les journalistes du pays et étrangers, resserrent les contrôles sur la transmission par satellite et entravent le travail des universitaires et des activistes. Durant deux semaines en septembre, les officiels ont bloqué l’accès à Google, un important moteur de recherche et ont détourné le trafic vers des sites au contenu officiellement approuvé. Lorsque l’accès a été rétabli, les utilisateurs ont fait mention de blocage sélectif.  Les autorités chinoises semblent utiliser des systèmes de détection qui scannent les transactions d’Internet, y compris les courriels afin de bloquer le texte qui contient des combinaisons de mots sensibles.

Un second moteur de recherche, Altavista.com, a été arrêté durant un jour, mais le site Yahoo Chine a échappé au blocage. Au début de l’année,  avec environ 300 autres compagnies d’Internet, Yahoo a volontairement signé un accord de commerce garanti :  « Garantie Publique d’Autodiscipline Pour l’industrie Chinoise d’Internet », s’engageant lui même à enlever toute information que le gouvernement prétendrait pouvoir mettre en danger la sécurité, perturber la stabilité, violer les loi ou répandre la superstition.

La garantie a été le reflet des réglementations du ministère de l’information et de la technologie qui étaient entrées en vigueur début 2002. Elles exigeaient des fournisseurs de services Internet d’utiliser seulement les envois de nouvelles de médias nationaux, d’enregistrer l’information nécessaire pour avoir la trace des utilisateurs et de leurs habitudes, d’installer des logiciels capables de copier les courriels et d’interrompre immédiatement la transmission de documents soi-disant subversifs.

Les autorités chinoises ont inculpé les activistes de subversion pour avoir utilisé l’Internet afin de servir des causes allant du changement politique au droit du travailleur. En Août, une cour de Gansu a condamné Li Dawei à 11 ans de prison pour avoir télécharger 500 essais « contre-révolutionnaires » et les avoir publiés sous forme de livre. Lu Xinhua et Wang Jinbo ont été condamné à 4 ans pour avoir critiqué Jiang Zemin. Zhou Xiubao, un cadre du parti a été détenu en juillet pour un envoi Internet appelant les « vrais marxistes » dans le Comité Central du parti à se rassembler. En Août, des fonctionnaires de la sécurité publique ont détenu Chen Shaowen pour des articles sur le chômage, les défauts de la loi et les inégalités sociales. En Octobre 2002, les cours n’avaient toujours pas prononcé leur verdict concernant 5 activistes jugés pour des infractions liées à Internet en Août et Septembre 2001.

Une campagne pour fermer les cafés Internet sans licence a commencé en Avril, s’est accélérée en Juin après un feu mortel dans un café de Pékin et a culminé en Octobre avec la promulgation de nouvelles règles. Ils ont interdit les petits cafés qui n'avaient pas de fonds suffisants, ont limité les heures de fonctionnement, ont interdit les utilisateurs de moins de 16 ans, ont exigé l’enregistrement de cartes d’identification et ont permis aux autorités de voir les enregistrements d’utilisation d’Internet. La plupart des cafés avaient fonctionné de manière illégale en raison des règles de licence restrictive et de la corruption concomitante.

A compter du 1er janvier, les autorités chinoises ont exigé que les diffusions des télévisions étrangères passent par une plate-forme de rediffusion pour distribuer leur chaîne, ainsi augmentant les possibilités de censure officielle. Quelques semaines plus tôt, les autorités de Pékin avaient ordonné  le démantèlement des antennes paraboliques fournies par les compagnies de télévision câblée aux téléspectateurs chinois. Les « Dispositions sur la gestion la  télévision par satellite » révisées, exigent des universités, des hôtels, des résidences et des institutions  gouvernementales de s’inscrire de nouveau pour regarder les programmes par câble et satellite étrangers. Les départements des universités ont dû prouver qu’ils en avaient besoin pour leur recherche ; les hôtels et les complexes résidentiels étrangers ont dû prouver un taux d’occupation d’étrangers de 80 %.

Les restrictions sur la presse écrite nationale ont augmenté. Plusieurs circulaires du parti ont ordonné à des journaux officiels d’être prudents lors de reportages sur des sujets sensibles et de ne pas publier des articles téléchargés sur Internet. Une circulaire a rappelé aux éditeurs que toutes les histoires relatives à la direction centrale et à leur famille devaient être approuvés par des autorités « plus élevées », que les rapports sur les nouvelles politiques principales devaient se référencer à Xinhua, l’agence de presse officielle et que même les histoires objectives qui pourraient affecter la stabilité ou inciter le public à demander justice ne devaient pas être publiées.

La liste officielle des sujets demandant la prudence comprennent : Taiwan, le Tibet et l’indépendance de l’Est Turkestan, les extrémistes religieux et le Falun Gong, les militaires, la stratification sociale, le projet de dérivation de l’eau Nord-Sud, les plaidoyers en faveur de la propriété privée, les impôts et les taxes dans les régions rurales, les avances d’argent aux étudiants, la recherche en génétique humaine, les entrepreneurs privés délégués du Parti, les procès contre le gouvernement, les villageois qui vendent leur sang, les listes de Forbes, l’éducation morale de Confucius dans les écoles primaires, les grades à l’université, le chemin de fer Qinghai-Tibet, et les accidents majeurs. Les autorités ont aussi ajouté des restrictions en matière de reportage sur les cas légaux.

Fin 2001, après que l’ « Hebdomadaire du Marché des Titres » ait publié un article critique sur la richesse amassée par le Président du Congrès National du Peuple, Li Peng et sa famille, les autorités ont confisqué tous les exemplaires traitant le sujet. En mars 2002, les fonctionnaires du ministère de la propagande ont ordonné à Nangfang Zhoumuo ( Sud Week end) d’enlever un article sur les irrégularité financières dans  le « Projet Espoir ». La Ligue de la Jeunesse Communiste contrôle la fondation s’occupant de la charité. En Avril, le magazine, sous la pression a licencié trois rédacteurs. Le Journal de l’Ouvrier, journal officiel, a sympathiquement rendu compte de la situation difficile des ouvriers dans le Nord-Est de la Chine. Le département de la publicité du parti communiste chinois a mis en garde  quant aux reportages sur la restructuration et les droits des travailleurs sans considérer « l’intérêt national global » , réciproquement, le département a demandé de rendre compte  positivement des efforts du gouvernement pour aider les ouvriers à trouver un nouveau travail.

En février, un bureau du gouvernement du district de Beijing a publié une directive «  Concernant le Renforcement de La Gestion des Evénements Impliquant des Entrevues avec  des Journalistes Etrangers », sur la base d’un document du ministère des affaires étrangères. La directive stipulait que seul un fonctionnaire d’un bon niveau politique pouvait parler pour une unité de travail ; qu’un rapport écrit remis au bureau des affaires étrangères du district était exigé  après une entrevue ; et que les demandes pour pratiquer des études sociales  ou des sondages d’opinion seraient refusées. Les règlements ont interdit des entrevues avec des « éléments » de Falun Gong ou des militants démocrates, et sur des sujets liés aux minorités ethniques, à la religion, aux droits de l’homme et au planning familial. En novembre 2001, des officiers de police ont détenu une équipe allemande et un caméraman de CNN  qui filmaient une manifestation de Falun Gong, et ont confisqué le film, les cartes de presse, les permis de résidence, et l’équipement. En juin, la police a détenu le journaliste Canadien-chinois Jiang Xueqin pendant deux jours, pour avoir fait des recherches sur  le malaise ouvrier dans le Nord-Est. Les officiers de sécurité ont battu un journaliste sud-coréen couvrant une bagarre dans le consulat de Corée du Sud entre les diplomates et les gardes chinois. Les gardes avaient emmené de force un coréen du Nord qui avait demandé asile.

 Les autorités ont interdit les ventes en kiosque du Time pendant des mois pour avoir publié un article sur Falun Gong. En juin, l’Economiste a été retiré des kiosques  pour avoir publié sur 18 pages un article plaidant pour une réforme politique en Chine. En juillet, les autorités ont bloqué les services de télévision de la BBC World.

Les publications et les industries de film n’ont pas été épargnées. En janvier, les fonctionnaires du département de la propagande du parti et de 6 corps ministériels ont annoncé un resserrement visant les publications politiques. En septembre, le directeur de la Presse d’Etat et de l’Administration des Publications a annoncé que « des mesures pourraient être prises pour s’assurer que le marché des publications ne se fera pas l’écho de voix  remettant en question la politique et l’unité du parti. Une liste des livres interdits y compris les romans best-seller, un travail approfondi sur le déficit des recettes en Chine, un au sujet des paysans relogés dans le secteur du barrage des trois gorges, et une série dans laquelle des intellectuels expriment leur mécontentement. De nouvelles règles sur la gestion de films autorisent la production indépendante mais seulement avec l’approbation du département du Conseil d’Etat ( le corps exécutif de la Chine) concerné.

En septembre, le Quotidien du Peuple a averti les détenteurs de téléphone cellulaires de publipostage que la rumeur politique bouleversait la stabilité sociale.

Les autorités chinoises ont avancé avec précaution pour enrayer le malaise ouvrier, spécialement dans les villes du Nord-Est, où, en mars, des dizaines de milliers de retraités et d’ouvriers licenciés ont commencé la plus grande, la plus  longue et la mieux organisée des campagnes depuis les manifestations pro-démocratiques de 1999. Ils protestaient sur le non-paiement des arriérés de salaires et des pensions, les baisses de prix unilatérales des accords de rupture, l’absence d'aide sociale et la corruption des gestionnaires. A Liaoyang, les officiers de sécurité ont attaqué des manifestants désarmés, arrêtant quatre représentants des ouvriers, Yao Fuxin, Pang Qingxiang, Xiao Yunliang et Wang Zhaoming, au motif « de rassemblement, de marches et de protestations illégales ». A Daqing, les forces de sécurité ont menacé les ouvriers employés de leur faire perdre leur travail si leurs proches osaient protester. Dans tous les cas, les autorités chinoises se sont moquées du droit de libre association garanti par la Constitution chinoise et par  la Convention des Droits Economiques, Sociaux et Culturels que la Chine a ratifiées. La Chine a aussi ignoré ses engagements en tant que membre du Bureau International du Travail de respecter le droit à la liberté d’association.

Un autre emprisonnement relatif à des travailleurs s’est passé en 2002. Le 30 Mai, un tribunal de la province du Sichuan a condamné Hu Mingjun et Wang Sen, membres du Parti Démocratique Chinois qui est interdit, à des peines respectives de 11 et de 10 ans pour subversion en soutenant la grève des ouvriers. Le 1er juin, Di Tiangui était détenu dans la province de Shanxi, soupçonné de subversion pour avoir essayé de fonder une organisation nationale d’ouvriers à la retraite.

La tendance qui se développe est que les ouvriers, les travailleurs émigrés et les activistes de l’environnement ont commencé à utiliser le système judiciaire pour chercher réparation. Le Centre pour Assistance Légale aux Victimes de la Pollution,  à Pékin, a remporté beaucoup de succès.

Les autorités chinoises ont semblé être en  désaccord quand elles ont eu à faire face à une épidémie imminente de sida en Chine, admettant un nombre de cas en augmentation et collaborant en matière d’éducation et de prévention avec les Nations Unies et les organismes étrangers, mais aussi en essayant de contrôler les informations. L’ambivalence a été la plus marquée lors de la détention et la libération par la suite du Dr Wan Yanhai, internationalement reconnu pour avoir établi « Aizhi Action », un projet d’information sur le sida, et pour son plaidoyer en faveur des villageois frappés par le sida dans la province du Henan. Les officiers de la sécurité d’état ont arrêté Wan le 24 Août pour avoir fait circuler par courriel un document interne du gouvernement portant sur l’épidémie du Henan. Le document détaillait comment,  après que les villageois aient vendu leur sang aux postes de santé du gouvernement et que des ouvriers en aient extrait le plasma, on réinjectait aux villageois les produits sanguins mis en commun qui restaient, créant ainsi un haut risque de transmission du sida. Wan a été libéré le 20 septembre suite à un tollé international et une « confession » admettant que la publication du rapport était une « erreur ». Le 13 septembre, Human Rights Watch et le Réseau Légal Sida Canadien ont décerné à Wan le premier « Prix pour l’action en matière de sida et des droits de l’homme », un programme international de prix établi en 2002. Il avait été choisi plusieurs mois avant son arrestation.

Les universitaires au franc parler continuent d’être visés. En Janvier, la police d’Anhui a détenu un professeur à la retraite, Wang Daqi pour avoir refusé de cesser l’édition du journal « Recherche Ecologique ». Wang qui avait préconisé le besoin de réformes politiques pour arrêter la dégradation de l’environnement, était toujours détenu mi-novembre 2002.

Une campagne « Frapper Fort » de trois mois, lancée en Avril 2001, pour sévèrement agir sur l’activité criminelle, et presser la procédure judiciaire, semble être devenue un dispositif permanent de l’application des lois en Chine. Les cibles pour 2002 comprennent le crime organisé, les fonctionnaires corrompus, ceux qualifiés de terroristes, les séparatistes, les extrémistes religieux ou les membres de « mot calomnieux »  comme les pratiquants de Falun Gong. Selon les directives de « Frapper Fort » sont récompensés les condamnations, aggravant ainsi les causes de violations de procédure comme les détentions illégales, les procès  hâtifs, les condamnations sévères et une procédure d’appel  dénuée de sens. A Shanghai où le taux de rendement d’un juge est basé sur le nombre de cas examiné, des fonctionnaires de la ville on révélé que les tribunaux ont réduit « les formalités inutiles durant les interrogatoires, la présentation des preuves et les débats de la cour ».

Bien que le gouvernement ait procédé à des changements à la politique et à la procédure d’application de la loi destinés à les rapprocher des standards internationaux,  des différences importantes existent entre ce qui est écrit et ce qui est mis en application. Les changements en 2002 comprennent de nouvelles mesures disciplinaires pour  les juges corrompus ou incompétents, de nouvelles normes de compétence et d’éducation pour des soi-disant juges, procureurs et avocats, un code d’éthique pour les procureurs, l’introduction d’un procureur général pour chaque cas plutôt qu’un comité de procureurs, une  interdiction contre le licenciement des juges sans procédure légale véritable, et, comme élément de l’effort pour éliminer la corruption, des inspections annuelles d’une cour disciplinaire interne. Mais les cadres locaux et les fonctionnaires du parti ont toujours interféré dans le système de justice criminelle : les « confessions » de criminels obtenues par la torture sont inadmissibles en matière de preuve ; et les avocats de la défense se s’ont vu habituellement refuser l’accès à leurs clients et aux témoins de l’accusation.

(à suivre)

Rapport complet sur : http://hrw.org/wr2k3/asia4.html  

Traduit le 2 Février 2003