"Utiliser la raison pour prouver la Loi, utiliser la sagesse pour expliquer clairement la vraie image, utiliser la compassion pour que la Loi soit immensément répandue et pour donner le salut aux gens de ce monde" (Rationalité)


PLACE DES NATIONS  

La manif pacifique a fait place à une conférence de presse mouvementée.

PIERRE-ANTOINE PRETI

            Mille adeptes du Falun Gong se sont retrouvés hier matin sur la place des Nations. Ils y ont pratiqué leur gymnastique matinale face à l’ONU. Cette « pratique spirituelle » en terre genevoise a fait office de protestation contre la répression à l’encontre des pratiquants situés en République populaire de Chine. C’est ainsi que le Falun Gong a été informé sur le moment même par André Hediger qu’il pouvait prendre position sur la place des Nations, ainsi que cet après-midi et demain matin. Cette occupation se fait en alternance avec leurs opposants directs : la Coordination des étudiants chinois.

            En ce lundi matin, la discipline des membres du Falun Gong est impeccable. Un service d’ordre, composé principalement de Chinois « de chez nous », fait respecter la signalisation des passages piétons. Au centre de la place et sur les abords de la compagne Rigot, les 1000 personnes se sont alignées en rangs d’oignons. Elle ont pratiqué les exercices de la méthode. Une musique chinoise, agrémentée d’indications vocales, donne la cadence. Les bras ondulent. Les corps se plient sans casser, à l’image du roseau sous la brise. Certains se sont regroupés par appartenance nationale. Une forte communauté taiwanaise brandit sa pancarte. On communique en anglais ou avec les mains. Un suédois en habit de mandarin prête son tapis d’exercice à un vieux chinois parisien. L’ambiance est bon enfant. Mais les regards, tournés en direction de l’ONU, restent graves. Du côté du Palais des Nations, on a posé une couronne mortuaire « en mémoire des 162 victimes de la répression chinoise ». Pour expliquer le but de la manifestation, une conférence de presse a lieu au Restaurant Vieux-Bois de l’avenue de la Paix. Le président du « comité international des droits de l’homme du Falun Gong » en est l’hôte principal. Erping Zhang a l’œil doux mais sait être ferme. Un chinois se disant journaliste est exclu de la réunion. L’homme argue de son droit à l’information. Quatre organisateurs musclés le raccompagnent vers la sortie  avec souplesse. L’année dernière, quelques fonctionnaires de la République populaire avaient perturbé la conférence de presse du Falun Gong, empêchant tout dialogue entre les intervenants et les journalistes occidentaux. Le lendemain, à l’ambassade de Chine, les membres du Falun Gong avaient été exclus d’emblée de la causerie officielle. Cette année, la réponse du berger à la bergère ne s’est pas fait attendre : le « trublion » aidé par les malabars, s’en est allé en vociférant.

            « Le régime chinois continue sa brutale répression entamée depuis dix-neuf mois contre les membres du Falun Gong. En plus des morts sous la torture, nous avons recensé 50000 adeptes emprisonnés », annonce Erping Zhang. Des victimes et des spécialistes en témoignent devant l’assistance. S’en suit une litanie de sévices : « Les Falun Gong subissent humiliations, torture psychique et matraquage électrique », déclare le docteur Sunny Lu, de l’Université de Cincinnati. Soutenu dans ce combat par Amnesty International, le mouvement s’est lancé dans une campagne de sensibilisation de l’opinion publique. Depuis l’année dernière, un des points culminants de cette activité passe par Genève. Les trois prochains jours, les adeptes iront pratiquer leur art par petits groupes dans les communes genevoises. Ils se partageront également la place des Nations avec les anti-Falun Gong. Hier après-midi, ces derniers n’étaient que quelques dizaines…