Jeudi 21 mars 2002

"Halte au massacre". Près de 700 membres et sympathisants du mouvement spirituel Falun Gong ont ouvert hier trois jours de manifestations sur la place des Nations. Venus de tous les points de la planète, ils demandent à la communauté internationale de faire pression sur Pékin afin que cesse la répression. Ils espèrent également sensibiliser les Etats membres de la Commission des droits de l'homme réunis depuis lundi au Palais des Nations.

L'édito

André Allemand

Rubrique internationale :

DROITS DE L'HOMME EN CHINE :
L'ONU REGARDE AILLEURS

Pékin sortira indemne de la Commission des droits de l'homme. Une fois de plus, l'issue des débats est totalement prévisible. L'instance onusienne, qui a démarré lundi ses six semaines de travaux annuels au Palais des Nations, n'est jamais parvenue à condamner la Chine.

Pourtant, tout le monde est d'accord : la situation des droits de l'homme y est plus que préoccupante. Des quatre coins du globe, des pratiquants du Falun Gong sont venus hier nous en rappeler la gravité : Pékin reconnaît avoir éliminé 385 adeptes du mouvement depuis 1999. Des sources officieuses parlent de 1600 victimes. Quelques 20.000 personnes ont été condamnées aux travaux forcés en raison de leurs convictions religieuses. Et ne mentionnons même pas le drame de la colonisation du Tibet ou le traitement réservé aux minorités ethniques.

Mais paradoxalement, les droits de l'homme ne pèsent pas lourd au sein de la Commission des droits de l'homme. Dans l'ensemble, les diplomates délégués par les 53 pays membres votent en fonction de leurs alliances et de leurs intérêts économiques plutôt que dans la perspective de faire progresser le respect de la personne. On appelle ça de la Realpolitik.

Faut-il s'en offusquer ? Bien entendu. C'est même le principal intérêt de la Commission. Je m'explique. S'il est donc naïf d'espérer voir les Etats se muer en vibrants défenseurs des droits fondamentaux, il est quand même intéressant d'observer avec quelle énergie ceux qui sont pris à partie se défendent. Et puis, avec ou sans condamnation officielle, personne n'est dupe. La même Commission qui depuis toujours se refuse à réprimander Pékin offre une formidable tribune aux ONG qui dénoncent la répression en Chine.

Aux yeux des victimes, ce n'est pas rien. Mais est-ce vraiment suffisant ?

CHINE : "ARRETEZ LE MASSACRE DES ADEPTES DU FALUN GONG !"

700 manifestants ont rendu hommage aux centaines de pratiquants exécutés.

André ALLEMAND

"Halte au massacre! Sauvez les pratiquants persécutés en Chine!" Près de 700 membres et sympathisants du mouvement spirituel Falun Gong ont ouvert hier trois jours de manifestations sur la place des Nations. Venus des quatre points de la planète, ils demandent à la communauté internationale de faire pression sur Pékin pour faire cesser la répression.

"Les autorités chinoises reconnaissent avoir exécuté 385 pratiquants depuis 1999", dénonce Lee Kye Ja , de l'Association suisse de Falun Gong. "Mais de source officieuse, on sait que la répression a déjà fait plus de 1600 victimes. Cent mille personnes ont été arrêtées et souvent torturées, 20.000 d'entre elles internées dans les goulags, un millier enfermées dans des asiles psychiatriques."

Depuis trois ans, les persécutions ne font que s'aggraver contre ce mouvement interdit en Chine. Pour justifier la répression, les autorités le qualifient de "XX dangereuse".

Un long cortège funèbre

Partis de la place Neuve à 9h30, les manifestants ont d'abord formé un long cortège funèbre en mémoire des martyrs chinois. Marchant en tête, une cinquantaine de pratiquants vêtus de blanc arboraient les photographies des victimes de Pékin.

Descendant la Corraterie jusqu'à la place Bel-Air, le défilé silencieux a rejoint le pont des Bergues, pour ensuite longer les quais jusqu'au parc Mon-Repos et finalement remonter l'avenue de France.

Grève de la faim

Sur la place des Nations, une partie des manifestants compte faire grève de la faim jusqu'à vendredi en fin d'après-midi. Ils espèrent ainsi sensibiliser les délégués des Etats membres de la Commission des droits de l'homme qui sont réunis depuis lundi au Palais des Nations.

Les principales ONG dénoncent

Frappés, violés, torturés, brûlés vifs, … Les principales ONG internationales dénoncent chaque année la cruauté de la répression chinoise. "Aujourd'hui, les policiers tirent à vue sur toute personne collant nos affiches", assure un pratiquant européen. Mais les manifestants décrivent également le cauchemar "ordinaire" de millions de pratiquants : licenciements, exclusions scolaires, expulsions des logements, avortements forcées, etc.

Hier, plusieurs députés genevois sont venus apporter leur soutien : Marie-Paule Blanchard-Queloz et Erika Deuber-Ziegler (Alliance de Gauche), Thomas Büchi (radical) et David Hiler (les Verts).