(Minghui.org)

Cet article a été initialement publié le 6 décembre 2001 en anglais et le 20 décembre 2011 en français

BBC Monitoring

L'organisme international de surveillance des médias Reporters sans frontières (RSF) a demandé au régime de Jiang Zemin d'arrêter d'intimider les journalistes étrangers qui tentent de faire des reportages sur le mouvement spirituel Falun Gong, qui est interdit en Chine. Depuis que la Chine a promis de laisser les journalistes travailler librement pendant les Jeux olympiques de 2008 à Pékin, Robert Ménard, le secrétaire général de RSF, a dit que les autorités devraient cesser d'arrêter les correspondants étrangers. Avant la prochaine session de la Commission des Nations unies pour les droits de l'homme, RSF a dit qu'il ferait appel au Rapporteur spécial pour la liberté d'expression afin de dénoncer l'attitude des autorités chinoises envers les journalistes étrangers. Voici le texte d'un communiqué de presse en anglais par RSF, daté du 4 décembre, chapitré comme suit :

Le 20 novembre 2001, Jutta Lietsch, correspondante du journal allemand Leipziger Volkszeitung et collaboratrice du quotidien Tageszeitung, Wen-chun Fan, caméraman de la chaîne de télévision CNN, Stefan Niemann, correspondant de la chaîne de télévision ARD à Pékin, et son assistant ont été détenus et interrogés par la police alors qu'ils couvraient la manifestation des 35 pratiquants occidentaux du mouvement spirituel Falun Gong sur la place Tiananmen à Pékin. L'équipement des caméramen a été saisi. Les autorités ont accusé les trois journalistes de ne pas avoir demandé d'autorisation pour faire ce reportage. Ils ont été libérés deux heures plus tard, mais leur matériel, particulièrement leurs films, cartes de presse et permis de séjour ne leur ont pas été rendus. Jutta Lietsch a été invitée au Ministère des Affaires étrangères dans l'après-midi, où il lui a été dit que les autorités ne tiendraient pas compte de leur offense si les journalistes ne rapportaient pas les événements dont ils avaient été témoins. Suite à l'article publié dans la presse allemande, les autorités ont qualifié le correspondant d'ARD de « fauteur de trouble » et l'ont menacé de confisquer sa carte de presse pendant deux mois, afin de l'empêcher de travailler. Les autorités ont également saisi la carte de presse du journaliste de CNN Wen-chun Fan pour deux mois. Elles ont également pris des mesures semblables contre Stefan Niemann.

Reporters Sans Frontières (RSF) a protesté contre cet interrogatoire et ces menaces et contre la façon qu'ont les autorités chinoises d'essayer d'empêcher les journalistes étrangers de faire des reportages sur les activités du Falun Gong.

Au cours des deux dernières années, les autorités chinoises ont harcelé les journalistes qui enquêtaient sur cette organisation criminalisée par le régime. Le 22 juillet 1999, les autorités de Pékin ont interdit le mouvement spirituel après l'avoir accusé d'être une [terme calomnieux par le régime de Jiang Zemin omis]. En 28 mois, la répression lancée par le régime a causé, selon le Falun Gong, la mort d'au moins 250 personnes et la détention de 500 000 personnes, pour des périodes variables. Depuis le début de 1999, les correspondants de la presse étrangère en Chine ont été intéressés par le phénomène du Falun Gong, un mouvement inspiré par le taoïsme, le bouddhisme et aussi par la méditation traditionnelle chinoise, le qi gong. La pleine attention des médias s'est concentrée sur le sujet depuis la manifestation du 25 avril 1999, quand des milliers de pratiquants du Falun Gong ont envahi le siège des autorités centrales à Pékin.

Depuis que la campagne d'éradication contre le Falun Gong a été lancée par les autorités, les journalistes étrangers ont été systématiquement empêchés dans leur travail sur ce sujet. Des photographes et des cameramen étrangers ont été empêchés de travailler sur et autour de la place Tiananmen où des centaines de pratiquants du Falun Gong ont manifesté les dernières années. Selon les estimations de RSF, au moins 50 représentants des médias ont été interrogés. Certains d'entre eux ont été battus par la police. Les correspondants qui ont essayé de couvrir les activités du mouvement interdit ont été harcelés par les services de sécurité. En dernier lieu, beaucoup de pratiquants du Falun Gong ont été emprisonnés parce qu'ils avaient été interviewés par des journalistes étrangers.

La police est toujours présente aux alentours de la place Tiananmen, prête à interroger tout photographe ou cameraman qui pourrait tenter de prendre quelques photos de pratiquants manifestant pacifiquement contre l'interdiction de leur mouvement.

Les témoignages obtenus par RSF des correspondants de presse étrangers sont accablants pour les autorités chinoises.

Menaces et filatures

Le 28 octobre 1999, le Falun Gong a décidé d'organiser une conférence de presse secrète pour quelques médias internationaux. Une dizaine de journalistes étaient présents, parmi lesquels des agences de presse étrangères. Les porte-parole du Falun Gong ont eu suffisamment de temps pour expliquer la nature de leur mouvement et dénoncer la répression à laquelle ils sont soumis. Le jour suivant, les médias du le monde entier ont rapporté cette conférence de presse - une véritable humiliation pour les services de sécurité chinois qui ont voulu se venger. La police chinoise a détenu cinq correspondants de la presse étrangère et saisi leurs cartes de presse. Durant de longs interrogatoires, ponctués par des menaces, les journalistes ont été accusé de fabriquer des « reportages illégaux ». Ils ont été forcés à signer une lettre dans laquelle ils reconnaissaient avoir travaillé illégalement. Durant les mois suivants, la majorité des journalistes étrangers intéressés par le Falun Gong ont été filés, interrogés et souvent menacés. Un correspondant d'un quotidien américain se souvient : « J'étais constamment suivi. Parfois de loin, parfois de près. Les policiers étaient très agressifs. Je ne pouvais même pas travailler ou rendre visite à des amis, parce que je craignais que ça ne leur cause des problèmes. Mes contacts étaient constamment surveillés et il m'était impossible de rencontrer des membres du Falun Gong par crainte qu'ils soient arrêtés. » Un autre journaliste basé à Pékin a dénoncé ces pratiques qui le forçaient toujours à « quitter la maison par la porte de derrière, se cacher dans un taxi et vérifier mille fois si nous ne sommes pas suivis avant de rencontrer quelqu'un. »

Transmettre des informations, particulièrement aux journalistes étrangers travaillant à Pékin, a également été la cause de nombreuses arrestations de pratiquants. Zhan Xueling, citée dans une série d'articles écrits par Ian Johnson, correspondant à Pékin du Wall Street Journal, a été arrêtée par la police le 24 avril 2001. Quelques semaines plus tard, elle était condamnée à trois ans de camp de travail. Le journaliste du quotidien américain a rapporté dans un article récompensé par le Prix Pulitzer, que la jeune femme accusait la police de la province du Shandong (dans l'est du pays) d'avoir battu à mort sa mère, également pratiquante de Falun Gong. Ian Johnson ne confirme pas que l'arrestation de Zhang Xueling était liée à son article, mais il est sûr qu'après avoir reçu le Prix Pulitzer pour ses articles sur le Falun Gong, « la police chinoise voudrait plutôt lui rendre la vie impossible à Pékin. » Il est maintenant correspondant à Berlin.

Gu Linna, un membre du Falun Gong, a été condamnée à quatre ans de prison pour avoir transmis des informations aux journalistes étrangers au sujet d'une centaine de membres forcés à subir un internement psychiatrique. Cette ancienne présentatrice de la chaîne de télévision de la province du Hebei a également pris part à l'organisation de conférences de presse pour les journalistes étrangers.

Interrogatoire et violence

Durant les deux dernières années, des dizaines de journalistes, parmi lesquels des photographes et des cameramen d'agences de presse, ont été interrogés par la police alors qu'ils tentaient de couvrir les activités du Falun Gong à Pékin. Environ vingt journalistes de l'AFP ont été arrêtés par la police. AFP, Reuters, AP et CNN ont tous été éjectés de la place plus ou moins violemment ou soumis à des contrôles entre les fourgons de police convertis en poste de police mobiles. La presse étrangère est donc « persona non grata » sur et autour de la place Tiananmen.

Un photographe d'une agence de presse étrangère à Pékin, natif de Chine, est systématiquement chassé de la place Tiananmen. Un journaliste français d'une agence de presse, interrogé en 2000 sur la place Tiananmen, a été privé de sa carte de presse pendant plus de dix jours.

Un photographe d'une agence de presse rapporte : « Pour les premières manifestations, nous avons décidé d'être présents en permanence dans le coin. Nous le faisions à tour de rôle. Aussitôt qu'un groupe de Falun Gong commençait une manifestation, les policiers regardaient s'il n'y avait personne avec un appareil photo ou une camera vidéo. Vous deviez être rapides pour éviter l'interrogatoire. Quand ils vous attrapaient, ils ouvraient d'abord votre matériel et vous prenaient votre carte de presse. Si vous aviez de la chance, ça ne durait que quelques heures, ou alors plusieurs semaines. En tout cas, ils vous empêchaient de travailler. » En juin 2001, Steven Shaver, un photographe d'AFP, a été interrogé et frappé par les policiers pendant le concert « Les trois ténors » en faveur de la candidature de Pékin aux Jeux olympiques de 2008, alors qu'il était en train de photographier l'arrestation d'une personne par la police. Comme d'habitude, les autorités chinoises ont retenu contre lui les accusations de « travail illégal ».

De la même façon, Teresa Bergada, journaliste pour Radio Catalunya, une chaîne de radio espagnole, a été détenue et frappée par la police en 2000, après avoir pris des photos de l'arrestation de membres du Falun Gong à Pékin. L'ambassade espagnole a dû intervenir pour assurer la libération de la journaliste.

Des équipes de télévision qui avaient décidé de prendre des images de la répression contre le Falun Gong ont fait face à un autre problème. CCTV, la télévision centrale de Chine, la chaîne des autorités et la seule chaîne ayant l'autorisation d'envoyer des images par satellite, a bloqué la transmission d'images concernant le Falun Gong sur l'ordre des autorités.

Répression contre le Falun Gong

Depuis 1999, le Falun Gong a utilisé des techniques modernes pour communiquer. Des rencontres et des manifestations ont été organisées au moyen de téléphones mobiles et de courriels. Le Falun Gong a lancé des sites Internet et des stations de radio à l'étranger. Les autorités ont réagi très violemment en essayant de prendre des mesures punitives contre ceux qui transmettaient des informations et pour empêcher les disciples de contacter les autres groupes à l'étranger. Depuis environ deux ans, les sites Internet du Falun Gong sont interdits en Chine et les visiter est passible d'une peine de prison.

Les mauvais traitements attribués aux forces de sécurité ont causé la mort d'au moins deux membres du Falun Gong qui ont pris part à la diffusion ou à la copie d'informations sur le groupe tirées d'Internet. Le 27 juin 2001, Li Changjun est mort après avoir été torturé par la police en prison. Il avait été arrêté le 16 mai pour avoir téléchargé et imprimé des documents d'Internet sur le Falun Gong. Selon le Centre d'information pour les droits de l'homme et la démocratie basé à Hong Kong, Li Changjun, âgé de 33 ans, travaillait pour le centre des impôts de Wuhan dans la province du Hubei (Chine centrale) et avait déjà été arrêté plusieurs fois parce qu'il préservait sa qualité de membre avec le groupe, comme les autorités l'ont appelé. La mère de Li Changjun a dit que son fils était couvert de cicatrices et de vilaines contusions, que sa nuque et ses oreilles étaient violet foncé et qu'il était anormalement maigre. Le 1er août 2001, Chen Qiulan, âgé de 47 ans, membre du Falun Gong, est décédé d'une crise cardiaque au centre de détention de Daqing (province du Heilongjiang, nord-est du pays). Il avait été arrêté en juillet 2001 parce qu'il propageait des informations sur le mouvement sur Internet. D'autre part, le professeur Chang a été condamné à trois ans de prison pour avoir envoyé des informations à une station de radio du Falun Gong basée à l'étranger. Il a été déclaré coupable de « divulguer des secrets d'État ». En fait, il faisait un reportage sur la répression du mouvement.

Conclusions

Ces violations de la liberté de presse sont inacceptables. La détermination de la Chine à empêcher la presse étrangère de couvrir les activités et la répression des autorités sur le Falun Gong illustre parfaitement son refus de la collecte indépendante d'informations. De cette façon, le Parti [nom du parti omis] chinois refuse à la presse étrangère le droit de couvrir les différences d'opinion, la corruption, le SIDA dans la province du Henan, les désastres naturels, le séparatisme tibétain et ouïgour et enfin le Falun Gong.

RSF a demandé au régime chinois d'arrêter ses intimidations envers les journalistes étrangers qui essaient d'informer l'opinion publique internationale sur la situation du Falun Gong en Chine. « La Chine s'est elle-même engagée vis-à-vis de la communauté internationale à laisser les journalistes travailler librement pendant les Jeux olympiques de 2008 à Pékin. Les autorités devraient anticiper cette généreuse promesse et arrêter de gêner les correspondants de la presse étrangers » a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de RSF. Avant la prochaine session de la Commission des Nations unies sur les droits de l'homme, RSF fera appel au Rapporteur spécial pour la liberté d'expression afin de dénoncer l'attitude des autorités chinoises envers les journalistes étrangers.

Traduit de l'anglais